« Les décideurs politiques en Afrique n’ont pas la culture des sondages »

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Lancé il y a dix ans en RDC, le cabinet d’études et de sondages Target Sarl mesure son impact dans l’économie africaine, et regrette cependant la faible attention que portent les décideurs politiques africains à la culture des sondages et des études. Pour Makers.Africa, Serge Mumbu, directeur général du cabinet d’études, fait le point sur ce secteur et ses enjeux en Afrique.

Makers.africa: Vers quels domaines orientez-vous généralement vos enquêtes et sondages ?
Serge Mumbu: Dans le cadre des publications du Cabinet Target, nous nous basons principalement sur des sujets d’actualité, tant nationaux qu’internationaux. Pour cette année 2021, nous avons par exemple publié des études sur la perception des mesures autour de la Covid19, les attentes à l’égard du nouveau gouvernement congolais, les réformes électorales … Mais lorsqu’il s’agit d’une enquête ou un sondage commandé par un client, nous nous laissons conduire par ce dernier selon ses besoins et objectifs. Pour satisfaire les attentes des clients, nous n’hésitons pas à recourir à des spécialistes ou experts d’un domaine.

Comment procédez-vous pour identifier un sujet d’étude. Est-ce par commande ?
Nous sommes connectés via différents réseaux et médias pour suivre l’actualité. Nous nous inspirons de l’actualité et de certaines questions pertinentes pour réaliser une étude. Mais il nous arrive aussi de recevoir des suggestions d’études de la part de nos followers sur les réseaux sociaux mais également des clients et des partenaires. Les études commandées par des clients sont pour la plupart confidentielles, car elles visent à prendre des décisions stratégiques qui ne nécessitent pas une divulgation auprès du public.

En dix années d’études et de sondages, comment appréciez-vous vos réalisations ? Pensez-vous qu’elles ont un impact sur le développement de votre pays et même de l’Afrique ?
Il est vrai que les décideurs politiques en Afrique n’ont pas tous la culture des sondages pour leur image de marque et leurs programmes d’actions, mais dans le secteur privé, l’impact est palpable pour le pays et pour l’Afrique.  A l’issue de chaque étude commandée par un client, nous fournissons des recommandations et des pistes de solutions. Lorsque celles-ci sont prises en considération, elles contribuent à l’atteinte des objectifs préalablement fixés. Nous ne pouvons pas donner des exemples vu la confidentialité, mais je peux vous assurer que les études ont un réel impact en RDC et en Afrique : des nouvelles marques ont été lancées avec succès, des organisations ont amélioré leur image auprès de la population, des entreprises ont mené des actions RSE avec plus d’impact, des politiques publiques ont été améliorées…

Comment les entreprises peuvent-elles exploiter les données que vous produisez ?
Tout dépend de l’objectif poursuivi par chacun de nos clients. Nous leur fournissons des recommandations et pistes d’actions, mais aussi la base des données pour des analyses plus poussées (besoins et attentes spécifiques d’une catégorie de consommateurs, segmentation du marché) ou pour la définition des stratégies.

Comment procédez-vous pour collecter vos données ? Est-ce toujours facile d’y avoir accès ?
En fonction des besoins de l’étude, nous procédons soit par la technique quantitative (questionnaire papier, téléphone ou en ligne), soit qualitative (entretiens individuels, focus groups) ou encore documentaire (revue en ligne, business intelligence). Deux ou plusieurs techniques peuvent être utilisées pendant une seule étude. La collecte n’est toujours pas aisée, car certains répondants peuvent se montrer réticents à répondre (sujets sensibles, secret professionnel) ou les informations sont inaccessibles, surtout au niveau des services publics.

Quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confrontées ?
Les difficultés sont celles inhérentes à toutes activités d’enquêtes. Ce sont notamment l’insuffisance ou l’inexistence des données statistiques pour les études documentaires, le faible taux de réponse pour les études en ligne (moins de 10%) et les enquêtes téléphoniques (entre 20 et 30%) mais aussi la réticence des répondants face à des sujets sensibles tels que ceux liés à la politique, à la religion et à la sexualité.
Il y a aussi cette principale difficulté qu’est le préfinancement des projets et l’accès aux marchés publics dans les différents pays.


Quels sont les avantages d’une telle organisation pour la RDC et même pour le continent?
Une agence d’études comme la nôtre permet de minimiser les risques d’échecs en prenant des décisions en toute connaissance de causes. Ce qui permet aux décideurs et diverses organisations et entreprises de poser des actions en tenant compte du contexte particulier de la RDC et de l’Afrique. Par exemple, une campagne de sensibilisation au vaccin contre la Covid-19 ne devrait pas se faire de la même façon dans les pays africains, ni même dans les régions d’un même pays, car il y a des sensibilités et connotations locales qu’il faudrait impérativement intégrer, et ce grâce aux études de marché. Parfois, le choix d’un simple nom peut entraîner un échec ou un succès retentissant d’une marque, si l’on n’a pas tenu compte des résultats d’une étude.

Comment appréciez-vous la quantité d’études menées au sujet de l’Afrique? Pensez-vous qu’il est nécessaire de développer davantage d’études en Afrique ? Quelles sont les perspectives du secteur sur le continent?
Plusieurs enquêtes sont réalisées sur le continent africain, et elles permettent de mieux cibler des actions et mettre en place des stratégies efficaces. Cependant, il faudrait éviter de généraliser les résultats sur la base de quelques pays. L’Afrique est très complexe et diversifiée ; il existe souvent des différences fondamentales entre grandes régions (le Maghreb, l’Afrique Australe, l’Afrique Centrale, l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique de l’Est). Même à l’intérieur des pays, il y a des spécificités régionales/provinciales.
Il est important de développer davantage d’études en Afrique, car dans beaucoup de domaines, les informations manquent ou ne sont plus d’actualité. Le continent regorge beaucoup de potentialités qu’il faudrait exploiter. Nous pensons de ce fait que le secteur des études devrait en principe en profiter. Les investisseurs et décideurs devraient davantage recourir aux études pour les orienter. Il appartient aux cabinets d’études de mieux ajuster leurs offres en tenant compte des budgets et des attentes particulières des clients.

Propos recueillis par Canicha Djakba

Target Sarl est un cabinet d’études de marché, de sondages d’opinion, de conseils en marketing et en stratégies. Pour les études et sondages, le cabinet travaille en conformité avec les normes internationales d’Esomar (www.esomarg.org), le regroupement mondial des professionnels des études de marché qui existe depuis plus de 75 ans, avec plus de 6.000 membres dans le monde entier.
Hormis la République Démocratique du Congo, Target Sarl couvre d’autres pays africains tels que le Congo, le Rwanda, le Burundi, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Ghana. 

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