La Tunisie fait face à une sécheresse persistante depuis des années, une situation qui fragilise ses ressources hydriques et met à rude épreuve la production agricole. Comme dans la majorité des pays d’Afrique du Nord, la raréfaction de l’eau pousse les autorités à innover pour garantir la sécurité alimentaire et la résilience du secteur agricole. C’est dans ce contexte que le gouvernement tunisien, en partenariat avec l’Italie, a lancé le projet TANIT, un programme ambitieux visant à valoriser les eaux usées traitées pour l’irrigation.
Officialisé le 3 novembre 2025, le projet TANIT marque une nouvelle étape dans la coopération bilatérale entre Tunis et Rome. Selon le ministère tunisien de l’Agriculture, cette initiative s’inscrit dans le cadre du partenariat Tunisie-Italie 2025-2027, en lien avec le Plan Mattei pour l’Afrique, lancé par l’Italie afin de promouvoir un développement durable et équitable sur le continent. Le projet est mis en œuvre avec le concours de l’Agence italienne pour la coopération au développement, de la Caisse italienne des dépôts et consignations, et du Centre international de hautes études agronomiques méditerranéennes (CIHEAM) de Bari.
Le programme s’articule autour de trois axes stratégiques : le traitement et la réutilisation des eaux usées, l’amélioration de la performance agricole dans plusieurs zones pilotes, et le renforcement des capacités locales en matière de recherche, de formation et d’innovation. À travers ces volets, TANIT ambitionne d’offrir une réponse structurelle et durable à la crise hydrique que traverse le pays. Sur le plan pratique, le projet prévoit d’irriguer 11 500 hectares de terres agricoles à partir d’eaux recyclées issues de la région de Tunis. Les exploitations concernées appartiennent à l’Office des Terres domaniales et se situent notamment à Bouraghba, Borj El Amri, El Kheir, Smenja, Enfidha et Echchâal, réparties dans les gouvernorats de Tunis, Zaghouan, Sousse et Sfax. Plusieurs stations d’épuration, dont celles d’El Attar, Melliane, Sfax, Enfidha et Agareb, seront mobilisées pour assurer un approvisionnement régulier en eau traitée.
La réutilisation des eaux usées n’est toutefois pas une nouveauté en Tunisie. Depuis 1987, le pays s’est engagé dans une politique nationale de recyclage des eaux traitées pour l’irrigation. Selon les données de l’Office national de l’assainissement (ONAS), 57,6 millions de m³ d’eaux usées traitées ont été réutilisées en 2023. Cependant, à peine 19 %, soit 10,89 millions de m³, ont servi directement à l’irrigation agricole, couvrant 2 725 hectares sur les 7 794 hectares aménagés à cet effet.
Avec le lancement de TANIT, Tunis espère ainsi amplifier l’usage des eaux recyclées afin d’atténuer la pression sur les nappes phréatiques et les barrages, déjà fortement sollicités. Le défi est crucial : près de 80 % des ressources en eau du pays sont consommées par l’agriculture, un secteur vital pour l’emploi et la sécurité alimentaire. En promouvant une gestion plus durable et innovante de l’eau, la Tunisie se positionne comme un modèle régional d’adaptation face au changement climatique.





