En Afrique, de plus en plus de pays se rendent compte de l’importance du rôle des startups dans la croissance économique et leur octroient des facilités fiscales. Mais en République Démocratique du Congo (RDC), ces entreprises innovantes subissent la rigidité et la pression d’un régime fiscal inadapté. Cet état de fait constitue un frein au développement des jeunes pousses.
Selon un rapport datant de mai 2020 de l’Observatoire de la Francophonie Economique, en RDC, “l’environnement économique est malsain, ce qui n’encourage pas l’entrepreneuriat des jeunes”. Ce pays, le plus grand d’Afrique en termes de superficie, soit 2,345 millions km², regorge de potentialité d’innovation. Mais son système fiscal étrangle les startups. En RDC, la pression fiscale exercée sur les startups et petites entreprises est bien supérieure à la moyenne continentale, 54,6%, contre 47,1%, selon les chiffres de PWC (Price waterhouse Coopers).
Une multitude de charges fiscales
En RDC, il n’existe pas encore de cadre légal tracé pour définir et encadrer l’activité des startups ainsi que leur fiscalité. Ce qui est appelé Startup Act, et déjà expérimenté par certains pays d’Afrique comme la Tunisie, est absent en RDC. Tout est alors confondu. Il n’est pas clarifié la notion de startup et elles ne sont pas identifiées comme des entreprises qui nécessitent des mesures fiscales d’accompagnement.
En l’absence d’instrument légal spécifique, la PME, tout comme la startup, est classée soit selon le chiffre d’affaires, soit selon le type de gestion appliquée, soit encore selon le nombre d’employés. En conséquence, une startup est soumise au régime général d’impôts et doit s’acquitter d’une multitude de charges fiscales.
On peut citer, entre autres, l’impôt foncier, l’impôt sur les véhicules (ainsi qu’une taxe spéciale de circulation), l’impôt sur la superficie des concessions minières et d’hydrocarbures, l’impôt sur les revenus locatifs, l’impôt sur les revenus mobiliers, l’impôt sur les bénéfices et profits. Tous ces impôts relèvent de la compétence des provinces.
Il existe, par ailleurs, d’autres taxes secondaires qui relèvent de la compétence des différents ministères ou entités territoriales décentralisées. A ce propos, l’écrivain et ancien journaliste congolais, Marcel Yabili, a recensé en 2016, 50.000 taxes, redevances et droits à reverser à différents ministères, 26 provinces et 1453 entités territoriales décentralisées.
Dans ce contexte et face à ce tableau fiscal complexe , une entreprise naissante a peu de chances de survivre. Le trop d’impôt et l’absence de mesures fiscales incitatives sont dissuasives. Cela n’encourage pas l’investissement privé et constitue un frein pour l’entrepreneuriat, la création de startups, l’emploi et la croissance économique du pays.
En RDC, le milieu des affaires est d’ailleurs considéré comme étant très mauvais. Selon Doing Business 2020 (un rapport qui établit un classement des pays selon leur environnement des affaires), la RDC est classée 49ème sur 54 pays.
Vers un Startup Act ?
Lors d’un forum organisé par Congo Millenium Business Club à Paris en 2018, le conseiller stratégique de Kandindi-France, Patrick Busquet, a fait le constat que la RDC a une intelligence de créativité exceptionnelle. Cependant, selon lui, il importe que le pays adopte un système fiscal favorable à l’entreprenariat. Cela pour attirer les investisseurs et encourager l’entreprenariat.
Il apparaît donc nécessaire de démultiplier les impôts en optant pour une fiscalité plus souple en faveur des startups. Car celles-ci occupent désormais une place de choix dans le développement et la croissance économique des nations africaines. L’une des solutions impérieuses pour la RDC est la mise en place d’un Startup Act qui va tracer le cadre légal et définir les conditions pour bénéficier des avantages fiscaux nécessaires pour le démarrage d’une startup. Et ceci nécessite une réelle volonté politique. Sur le continent africain, certains pays tels que la Tunisie, le Sénégal, le Mali et le Rwanda ont compris l’enjeu et font des efforts pour encourager la création et l’innovation. La RDC peut s’en inspirer.
Materne Aguessy