Âgée de 60 ans, l’ancienne ministre des affaires étrangères du Rwanda préside aux destinées de l’institution depuis deux ans, un poste où plusieurs ne l’y attendaient pas.
Tollé et surprise générale en 2018, lorsque Louise Mushikiwabo annonce sa candidature à la tête de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Plusieurs peinent à concevoir qu’une Rwandaise, dont la famille a été décimée au cours du génocide rwandais, se propose pour diriger la Francophonie. En effet, cette institution est très influencée par la France, pays accusé par le Rwanda d’avoir joué un rôle dans la politique ayant conduit à ce massacre. Sur le plan politique, le soutien d’Emmanuel Macron à sa candidature suscite des critiques de personnalités, qui estiment que le pays n’est pas assez démocratique et francophone, pour qu’une de ses représentantes puisse prétendre à un tel poste au sein de la francophonie. Son élection le 12 octobre 2018 n’a fait que conforter ces opinions.
Mais pour la dame de fer, qui aime à se décrire comme « une citoyenne du monde, profondément africaine et originaire du village nommé Rwanda », il était temps de surpasser les séquelles d’une histoire sombre, et de travailler à rendre le monde meilleur. Et c’est ce à quoi elle s’attelle depuis sa prise de fonction en janvier 2019. « Nos populations demandent des résultats de plus en plus tangibles. La transparence et la bonne gestion sont indispensables pour avoir plus de résultats », révélait-elle récemment au magazine Jeune Afrique. Pour cela, Louise Mushikiwabo veut « moderniser » la Francophonie, comme elle le martèle. Elle fonde, pour ce faire, sa politique managériale sur la « rigueur, les résultats, et le développement de la diplomatie ».
Citoyenne du monde depuis toujours
D’origine Tutsi, Louise Mushikiwabo est âgée de 60 ans. Née à Kigali, elle est la cadette d’une fratrie de neuf enfants. Après son baccalauréat, elle obtient en 1986 une bourse pour poursuivre ses études au Etats-Unis, où elle étudie les langues et l’interprétariat. Son diplôme lui ouvre les portes de l’emploi. Au bout de vingt années passées aux États-Unis, Louise Mushikiwabo part s’installer en Tunisie, où elle travaille au sein de la direction de la communication de la Banque africaine de développement. L’assassinat de son frère aîné, le ministre Lando Ndasingwa au cours du génocide de 1994, ainsi que d’autres membres de sa famille, la pousse à co-rédiger un livre semi-biographique intitulé « Rwanda means the universe : a native’s memoir of blood and bloodliness ».
En 2008, Louise Mushikiwabo fait son entrée dans le gouvernement rwandais, d’où elle n’en sortira qu’en 2018, suite à son élection à la tête de l’OIF. Elle y a d’abord été ministre de l’Information, puis ministre des Affaires étrangères et de la Coopération.
En 2019, elle remplace Michaëlle Jean à la tête de la Francophonie et devient ainsi la quatrième secrétaire générale de cette organisation et la première femme africaine à occuper ce poste. Un poste qui consiste notamment à fédérer les 84 Etats membres autour de la promotion de la langue française, des droits de l’Homme et du développement inclusif.
Pour réussir son premier mandat, qui prendra fin en janvier 2023, Louise Mushikiwabo devra relever de nombreux défis, parmi lesquels: réussir le 18e sommet de la Francophonie qui se tiendra les 20 et 21 novembre prochain dans la ville de Djerba en Tunisie et tenir avec succès la 9e édition des jeux de la Francophonie prévue du 19 au 28 août 2022 à Kinshasa en République démocratique du Congo. Deux événements majeurs dont la réussite est fortement conditionnée par la crise sanitaire actuelle. Bien qu’imprévue dans son plan d’action initial, la gestion de la pandémie Covid-19 est aussi un défi pour celle qui promeut le développement économique des pays francophones.
Canicha Djakba