Jusqu’ici, l’Afrique n’a pas pu profiter pleinement de ses voies fluviales pour asseoir un système de mobilité efficient. Mais les lignes sont en train de bouger grâce à différents projets infrastructurels et d’équipements visant à faire des fleuves, des rivières et des canaux des outils de connectivité modernes.
Le Ghana mise sur le lac Volta
En Afrique de l’Ouest, le Ghana veut tirer profit de ses cours d’eau autrement que par la production d’électricité, en y développant des activités de transport. Un projet de desserte via le lac Volta est à l’étude. C’est le ministre ghanéen des Transports, Kwaku Ofori Asiamah, a déclaré que son cabinet a entrepris une étude de faisabilité pour un plan de développement du transport fluvial via le lac.
« L’objectif du projet est de faire du lac Volta une liaison de transport viable et compétitive, tout en facilitant la mise en place de liaisons ferroviaires et la connexion de ponts routiers manquants le long des corridors et de l’arrière-pays », a indiqué le membre du gouvernement qui a précisé que « le projet présenterait 5 navires, un système de gestion intégré, une cale de halage et 10 sites de débarquement de ferry, avec plusieurs autres installations qui facilitent la desserte de localités du Sud et du Nord du Ghana ».
Pour exploiter de manière optimale l’atout naturel que constituent les nombreux cours d’eau qui le traversent, au profit du transport, le Ghana doit investir plus de 600 millions USD. Le projet initial, s’il est mis en œuvre, permettra déjà de développer et populariser ce mode de transport dans le pays. Il contribuera également à la politique gouvernementale qui vise à décongestionner le trafic routier grâce à un report modal, notamment vers les transports ferroviaire et fluvial pour lesquels plusieurs autres projets sont en cours de réalisation.
Le Ghana n’est pas le seul pays africain à vouloir miser sur ses fleuves. L’Autorité du Bassin du Niger, qui regroupe neuf pays de la région dont le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Niger et le Nigeria, compte aussi pousser ses pions. Un Plan d’action de développement durable du Bassin du Niger (PADD) a été élaboré, d’un coût de 8 milliards de dollars sur 20 ans. Le projet concerne l’optimisation du stockage de l’eau pour une meilleure redistribution ainsi que le développement des échanges par les voies fluviales. De l’autre côté du continent, en Afrique de l’Est, des projets d’envergure sont aussi annoncées, comme celui du Malawi et de la Tanzanie (évalué à 829 millions USD) qui permettra de mieux exploiter le bassin de la rivière Songwe, frontière naturelle entre les deux pays. L’initiative soutenue par la Banque Africaine de Développement comprend des projets dans l’hydroélectrique, l’irrigation et le transport fluvial.
Des grands projets en Egypte et au Maghreb
L’Etat égyptien assure tout mettre œuvre en vue d’améliorer l’aptitude des services de transport fluvial sur le Nil et sur ses canaux navigables en vue d’une exploitation optimale, basée sur des bases techniques et économiques appropriées. Le réseau du transport fluvial s’est ainsi allongé pour atteindre 35 000 km, participant au transport de 2590 millions de tonnes/km. La voie navigable Assouan-Caire ayant connu un développement de 760 km est l’axe Caire-Alexandrie de 220 km.
En outre, le gouvernement égyptien dispose désormais d’un plan global pour le développement du transport fluvial qui est vu comme « le moyen qui consomme le moins du carburant, qui est le moins cher, plus sûr et respectueux de l’environnement ». Si le volet budgétaire de ce plan n’est pas encore connu, Le Caire a déjà fait savoir que des projets d’envergure vont être réalisés dans les prochaines années. D’ailleurs, l’un des protocoles d’accord signés dernièrement entre l’Egypte et le groupe émirati AD Ports concerne la construction d’un port fluvial à Minya, situé à 245 km au sud du Caire. Selon Abu Dhabi Ports Group (ADP), la société mère d’AD Ports qui a promis un investissement de 500 millions de dollars, ce projet intègre notamment « la construction d’un silo pour stocker et exporter du sucre via le port de Damiette ».
Toujours en Afrique du Nord, les pays comme le Maroc et la Tunisie s’activent également. L’Agence nationale des ports (ANP) du Maroc vient, par exemple, de lancer une étude qui s’inscrit dans le cadre du projet de requalification et de la reconversion du port de Kénitra. L’agence projette la réalisation d’un bassin de plaisance et la réhabilitation des quais existants afin d’offrir aux plaisanciers une « expérience unique » de navigation fluviale. Ce grand projet nécessitera pas moins de 748 millions USD d’investissement. Du côté de Tunis, la priorité concerne la modernisation des infrastructures du canal Medjerda-Cap Bon (120 km). Cette voie multi-usages située au nord-est de la Tunisie, mise en service en 1984, arrive à saturation en période de pointe et comporte des ouvrages dont l’âge fait courir d’importants risques sur la desserte en eau. Les travaux d’aménagement et de modernisation du canal et de ses ouvrages ont pour objectif premier d’améliorer la capacité de transfert et de contribuer à satisfaire les demandes croissantes en eau. La banque de développement allemande, KfW, a déjà financé une partie du projet à hauteur de 30 millions USD.