Interdites dans la majorité des pays du continent, ces devises électroniques gagnent du terrain au Nigeria, au Ghana, en Afrique du Sud, au Botswana, en Ouganda ou encore au Zimbabwe. Au Nigeria, son implantation est tel qu’elle amène le gouvernement à lancer une monnaie électronique, le E-Naira. Point avec Makers.
Cryptomonnaie, crypto actif, ou encore crypto devise, ces différents termes désignent un même objet: la monnaie générée et gérée grâce à des systèmes informatiques. Ces actifs virtuels stockés sur un support électronique permettent à une communauté d’utilisateurs d’effectuer des transactions sans avoir à recourir à la monnaie en vigueur.
Exempte de tout contrôle des banques centrales et autres institutions financières, la cryptomonnaie reste interdite dans plusieurs pays du monde, plus de 20 ans après sa création. Les gouvernements y voient un outil de déstabilisation du système financier actuel, avec notamment les risques de blanchiment d’argent qu’il comporte. Une réticence qui n’empêche cependant pas l’essor de ce produit technologique. Bitcoin, Ethereum, Tether, Ripple, Litecoin, Cardano, Polkadot ou encore Bitcoin Cash, la cryptomonnaie se développe et de nouvelles devises sont créées tous les jours ou presque. Le développement des crypto devises étend ses ramifications en Afrique, avec une percée particulière dans les pays d’expression anglaise.
Nigeria, premier pays africain émetteur d’une cryptomonnaie
Longtemps interdite au Nigeria, la cryptomonnaie n’a pour autant pas cessé de prospérer dans ce pays. Selon une enquête en ligne réalisée en 2020 par la plateforme de données Statista, 32 % de l’échantillon étudié a recours à la cryptomonnaie. Ce qui positionne le Nigéria au troisième rang des 10 pays ayant le plus grand volume d’échanges de cryptomonnaie en 2020. Ainsi, les Etats-Unis, la Russie et le Nigeria cumulent 400 millions de dollars de transactions en 2020, renseigne le site de la BBC Afrique. Une invasion du pays par la cryptomonnaie qui n’a pas laissé indifférentes les autorités du pays. Depuis le 25 octobre dernier, le Nigeria émet désormais une monnaie électronique dénommée E-Naira. Une décision prise par les autorités, afin de s’arrimer à la nouvelle donne, qu’est la monnaie électronique. En effet, il s’agit d’une solution proposée par la banque centrale du pays pour reprendre la main, alors que de plus en plus de Nigérians commencent à s’intéresser au Bitcoin. Les Nigérians sont invités à télécharger un portefeuille numérique qui leur permet désormais de payer dans certains magasins et de s’échanger de l’argent plus rapidement, à moindre frais. Le Nigeria est donc le premier pays d’Afrique à lancer sa propre monnaie numérique.
Au Zimbabwe, les crypto devises comme solution aux dévaluations
Au Zimbabwe, la dévaluation constante du Zim Dollar a boosté le développement de la cryptomonnaie. Ainsi, après l’hyperinflation de 750 % qu’à connu le pays ces trois dernières années, les populations ont perdu confiance en la monnaie locale et se sont ruées vers l’alternative cryptomonnaie. D’après une récente étude menée par le site Decrypt, les cryptomonnaies sont encore plus plébiscitées dans le pays que la monnaie zimbabwéenne, au point où, « Il y aurait même une prime de 18 % supplémentaire à payer pour acquérir des BTC, par rapport au cours du marché », relève l’ étude.
Le Ghana envisage de créer sa cryptomonnaie
Après avoir interdit les transactions de cryptomonnaies en 2018, le gouvernement ghanéen se penche désormais sur la possibilité d’émettre son propre crypto actif. Ernest Addison, le gouverneur de la Banque centrale ghanéenne, annonçait en 2019 le projet de création d’un crypto actif propre au Ghana. Sans donner de date précise, il avait annoncé que le projet se ferait d’ici quelques années. En juillet dernier, Ernest Addison, gouverneur de la Banque centrale annonçait que « Nous sommes assez avancés dans ce processus […]. Avec ce genre de choses, vous devez procéder par phase, et la première portait sur la conception de la monnaie électronique, et l’équipe se penche sur la phase de mise en œuvre », a -t-il indiqué
En Afrique du Sud, une monnaie légale
La première plate-forme d’échange africaine est née en Afrique du Sud, en 2013. Selon les dernières statistiques, Luno compte déjà 1,5 million de clients dans 40 pays. La législation du pays n’interdisant pas les cryptomonnaies, l’activité prend de l’ampleur. L’Afrique du Sud abrite aujourd’hui cinq guichets automatiques de cryptomonnaies situés dans les villes de Johannesburg, Pretoria, Nelspruit et Le Cap. Ces guichets automatiques peuvent distribuer 100 à 1 million de Rand, soit 6,7 dollars à 6,7 millions de dollars par jour. Les pays tels que le Botswana, le Mozambique, l’Ouganda et le Kenya sont aussi dans la mouvance de la cryptomonnaie, et comptent chacun au moins un guichet de paiement électronique, connu et installé.
Canicha Djakba
Selon une étude que rapporte la BBC, la Deutsche Bank allemande révèle qu’à cause de l’inflation courante, qui constitue un vrai problème à l’économie, il est probable que d’ici 10 ans, les pays aient recours à la demande de devises alternatives. Une prévision qui se vérifie déjà en 2020. En juin de l’année dernière, l’Afrique a reçu et envoyé plus de 700 000 transactions en cryptomonnaies. Le nombre total de transferts inférieurs à 10 000 dollars a fait un bond de 55% en juin, pour atteindre une valeur de 316 millions de dollars. Il est à noter qu’au-delà des pays cités plus haut, les devises virtuelles sont présentes à travers l’Afrique et gagnent encore du terrain, même malgré les barrières législatives.
Canicha Djakba