De Léopold Sédar Senghor à Macky Sall, le pays d’Afrique de l’Ouest maintient à sa tête une classe d’intellectuels remarquables. Zoom sur leur parcours scolaire et académique.
Léopold Sédar Senghor, l’académicien de la langue française
Pour plusieurs, Léopold Sédar Senghor est un génie. 21 ans après sa mort en 2000, des pétitions réclament toujours son inscription au Panthéon, le mausolée français des personnalités qui ont influencé le pays. Car Léopold Sédar Senghor n’était pas seulement le président du Sénégal. Il était également, un grand intellectuel.
Né au Sénégal en 1906, il entame son parcours scolaire en 1994 à la mission catholique Ngazobil à Joal, sa ville natale. Six ans après, il obtient son certificat d’étude primaire, et s’en va poursuivre ses cours secondaires à la rue Vincens à Dakar, où il réussit son baccalauréat littéraire. Il obtient ensuite une bourse pour continuer ses études supérieures en France, sur recommandation de son proviseur. Arrivé à Paris en 1928, il étudie à la faculté des lettres de l’Université de Paris Sorbonne et parallèlement en classe préparatoire littéraire au lycée Louis-le-Grand, où il prépare le concours de l’école normale supérieure. Il obtient en 1931 une licence de lettres. En 1935, il est admis au concours d’agrégation de grammaire et devient le premier africain lauréat de ce concours, ce qui lui permet d’enseigner dans plusieurs établissements scolaires de Paris. Enrôlé lors de la deuxième guerre mondiale, il en sort héros après avoir été réformé pour maladie en 1942. Aux termes des hostilités, Léopold Sédar Senghor entame une carrière politique, sans pour autant s’éloigner de sa passion. Il est tour à tour député et ministre en France et au Sénégal. Il publie en 1945 son premier recueil de poème intitulé « Chants d’ombres ». Son élection à la tête du Sénégal en 1963 et ses quatre quinquennats (il démissionne au milieu du quatrième), ont aussi été des années d’intense production, soit une vingtaine d’ouvrages, d’essais et de poèmes, dont le célèbre « Liberté », publié en cinq tomes. Devant ce promoteur acharné des valeurs culturelles africaines à travers le mouvement de la négritude, un grammairien de haute facture et un leader politique, le monde s’incline. Léopold Sédar Senghor est primé à maintes reprises, et reçoit notamment la médaille d’or de la langue française. Docteur honoris causa de 37 universités, il entre en 1983 à l’Académie française, élu au fauteuil 16 de ce regroupement élitiste de grammairiens dont il en devient le premier membre africain. A sa mort en 2001, son poste reste vacant jusqu’en 2004, où l’ancien président Valéry Giscard d’Estaing l’y remplace.
Abdou Diouf, l’administrateur
Abdou Diouf est le deuxième président du Sénégal indépendant. Premier ministre au moment de la démission de Léopold Sédar Senghor, il devient son successeur constitutionnel le 1er janvier 1981.
Né en septembre 1935 à Louga, ville située dans le Nord-Ouest du Sénégal, il fait ses études primaires et secondaires dans la ville voisine de Saint-Louis, et obtient en 1958 son baccalauréat. Son parcours universitaire, il l’entame à Dakar, où il étudie le droit à l’Institut des hautes études, devenu Université de Dakar en 1957. La suite de ses études se fera à l’Ecole nationale de la France d’Outre-mer (Enfom). De la promotion 1958-1960, il en sort administrateur civil, major de sa promotion. A l’annonce de l’indépendance de son pays, il démissionne de la fonction publique française pour s’installer au Sénégal. Très vite, il gravit les échelons. De gouverneur de la région du Sine-Saloum à l’âge de 25 ans, il est par la suite promu à de hautes fonctions administratives au Sénégal. De la direction des affaires étrangères au poste de Premier ministre, puis de président de la République, en passant par celui de directeur du cabinet civil et de ministre du Plan, Abdou Diouf s’est imposé comme un commis d’Etat. Il réussit à se maintenir trois quinquennats de plus (après les deux ans d’intérim) à la tête du Sénégal, lors des élections de 1983, de 1988 et de 1993. En 2000, il est battu au deuxième tour des élections présidentielles par Abdoulaye Wade. Une transition qui se fait de manière très pacifique. Abdou Diouf accepte sa défaite et salue la victoire de son opposant. Un geste qui fera le tour du monde, Abdou Diouf et le Sénégal étant cité comme exemple de démocratie en Afrique. Un fait qui lui vaudra par ailleurs d’être élu président de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) en 2002 puis de rempiler en 2006 et 2010. Bien que favoris des pays membres pour un quatrième mandat, Abdou Diouf décline l’offre et se retire de la politique publique.
Abdoulaye Wade, le mathématicien, économiste et avocat
Abdoulaye Wade est né le 29 mai 1926 dans la ville de Saint-Louis au Sénégal, cité où il a d’ailleurs fait ses études primaires et secondaires. En 1947, il obtient un diplôme de fin d’études à l’école normale fédérale William Ponty-Sébikotane au Sénégal. Il s’envole par la suite pour la mère patrie, la France, où il a passé une dizaine d’années sur les bancs à apprendre, non pas dans une filière, mais dans au moins quatre. De 1951 à 1952, Abdoulaye Wade suit les cours de mathématiques supérieures au Lycée Condorcet de Paris. Il obtient en 1952 un Certificat d’études supérieures de psychologie générale à la Faculté des lettres de Besançon. En 1953, il décroche cette fois à la Faculté des Sciences de Besançon, un certificat d’études supérieures de mathématiques générales. Puis l’année d’après, un autre certificat d’études supérieures de mathématiques, physique et chimie (Mpc). Puis il revient en sciences sociales et réussit sa licence en droit à la Faculté de droit et de sciences économiques de Dijon en 1955. Il enchaîne avec un DES en droit et sciences économiques. En 1959, il est diplômé d’un doctorat en droit et sciences économiques défendu à l’Université de Grenoble. Porté sur le développement de son pays, sa thèse s’intitule “Economie de l’Ouest africain: unité et croissance”. Il exerce ensuite comme avocat au barreau de Paris, avant de revenir au Sénégal, bardé de diplômes, prêt à contribuer au développement du Sénégal. De retour au pays, Abdoulaye Wade enseigne à l’Université Cheick Anta Diop de Dakar, et devient par la suite agrégé des Facultés de droit et des sciences économiques, section sciences économiques de Paris Sorbonne en 1970.
Déjà intéressé par la politique, il est candidat malheureux aux élections présidentielles de 1978 contre Léopold Sédar Senghor, de 1983, 1988 et 1993 contre Abdou Diouf. Son combat paie finalement en 2000, lorsqu’il remporte enfin la présidentielle. Il se maintient au pouvoir jusqu’en 2012, avant d’être battu par Macky Sall, alors qu’il se présentait pour un troisième mandat.
Macky Sall, le pétrochimiste
A 61 ans, le quatrième et actuel président du Sénégal est un scientifique bourré de diplômes. Son parcours universitaire à commencé à l’Institut des Sciences de la Terre (IST) de Dakar (actuel Université Cheick Anta Diop), d’où il sort ingénieur géophysicien en 1988, au terme de cinq années d’études. Il est alors âgé de 27 ans. Il poursuit sa formation et devient ingénieur géologue diplômé de l’École nationale supérieure du pétrole et des moteurs (Enspm) de l’Institut Français du Pétrole (IFP) de Paris, en 1993. Ce diplôme équivaut à un Baccalauréat plus sept années d’études.
Macky Sall est membre de plusieurs associations nationales et internationales de géologues et de géophysiciens. Grand-croix de l’ordre international des Palmes académiques du Conseil africain et malgache de l’enseignement supérieur (CAMES) en 2013, le président Macky Sall est docteur honoris causa de six universités, notamment l’Université Abomey-Calavi du Bénin, l’Université de Genève, l’Université Suisse UMEF Genève, l’Université Pukyong de Busan, en République de Corée ou encore du Conservatoire des Arts et Métiers (Cnam), en France.
Canicha Djakba