Selon le Fonds Monétaire International (FMI), qui produit chaque année un rapport sur les perspectives de l’économie mondiale, l’Afrique devrait enregistrer une croissance de 3,7% en 2023, une prévision en baisse de -0,3% par rapport à celle publiée par l’institution en juillet 2022. L’institution de Bretton Woods explique notamment ces chiffres revus à la baisse par le ralentissement de croissance des principaux partenaires économiques de la région, dont la Chine et l’Union européenne, des conditions financières et monétaires plus strictes et une baisse de la demande des matières premières.
Pour 2023, c’est la Libye qui devrait occuper la première marche du podium, avec un taux de croissance de 17,9%, grâce notamment à un fort rebond de la production pétrolière, aux progrès prévus en matière de stabilité politique et à l’amélioration attendue de la situation sécuritaire. Le Sénégal devrait suivre la Libye dans le classement avec un taux de croissance de 8,1%, grâce notamment à l’entrée en production de plusieurs gisements d’hydrocarbures découverts ces dernières années. Le Niger (7,3%) est prévu d’occuper le troisième rang devant la République démocratique du Congo (6,7%), le Rwanda (6,7%), la Côte d’Ivoire (6,5%), le Bénin (6,2%), le Togo (6,2%), la Gambie (6%) et l’Ouganda (5,9%).
Pour l’Afrique subsaharienne, c’est donc le Sénégal (2ème) qui pointe en tête. Selon les prévisionnistes, Dakar doit ses bonnes perspectives au secteur des hydrocarbures qui devrait booster la croissance, grâce à la commercialisation des premiers pieds cubes de gaz naturel produis par le champ gazier de Grande Tortue Ahmeyim au troisième trimestre 2023. Mais le Sénégal récolte aussi les fruits de ses efforts en matière de diversification économique.
Derrière le pays de la Teranga vient le Niger (3ème) avec une croissance estimée à 7,3% en 2023, selon le FMI. Mais les autorités de Niamey estiment que la croissance devrait dépasser largement les 10%. Pour le ministre des Finances, Ahmed Jidoud, lors de la présentation du projet de budget 2023, le 5 octobre dernier, les hydrocarbures seront le catalyseur de la croissance avec l’achèvement de l’oléoduc reliant sur près 2 000 km Agadem au port de Sèmè au Bénin, permettant l’exportation de pétrole. La production de brut devrait ainsi passer d’environ 21 000 barils par jour à plus de 110 000 barils, dont la majorité sera exportée. Le deuxième secteur qui portera la croissance nigérienne est l’agriculture.
Pour les autres pays classés de l’Afrique de l’Ouest que sont la Côte d’Ivoire (6ème), le Bénin (7ème) et le Togo (8ème), la croissance sera surtout portée par l’agriculture, l’industrie, le BTP, les transports et le commerce, ainsi que l’augmentation des investissements directs étrangers. Le Bénin peut notamment compter sur sa filière coton et le développement des services. Globalement, les pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) verraient leur croissance passer à 6,4% en 2023. Ce sera la zone la plus vigoureuse sur le plan économique avec une inflation plus modérée, estimée à 3,1% en 2023 contre 11,9% pour l’Afrique subsaharienne. Toutefois, plusieurs pays de la zone doivent faire face à des difficultés de taille comme l’insécurité alimentaire.
En Afrique de l’Est (taux de croissance prévu de 4,7 %), le Rwanda (5ème) et l’Ouganda (10ème) seront les pays qui parviendront à sortir leur épingle du jeu avec des taux de croissance prévisionnels respectifs de 6,7 et de 5,9% en 2023. Si le premier mise sur l’agriculture, le tourisme et les investissements, le second compte sur le secteur pétrolier et gazier, l’industrie et aussi la relance du tourisme. A noter, par ailleurs, que depuis plusieurs années, les analystes ont fait remarquer que les croissance les plus dynamiques ont été réalisées en grande partie par les pays riches en ressources naturelles, mais qui parviennent à diversifier leurs économies.
L’Afrique du Nord moins performante
La Libye est donc l’exception qui confirme la règle puisque la croissance économique dans la région de l’Afrique du Nord se situera aux alentours de 4,2% en 2023, selon la Banque Africaine de Développement (BAD). Une prévision confirmée par le FMI.
Cette performance moins marquée par rapport aux autres régions du continent, notamment l’Afrique de l’Ouest, s’explique notamment par plusieurs difficultés auxquelles les pays d’Afrique du Nord font face. Il y a en premier lieu l’aggravation du déficit des comptes courants, dont la moyenne est estimée à 4,1% dans la région, et aussi du déficit budgétaire, notamment dans les pays où les produits alimentaires et énergétiques sont subventionnés par l’Etat, à l’instar de la Tunisie et l’Algérie, et ce, au vu de la flambée des prix de ces produits à l’échelle internationale.
Les économistes recommandent ainsi aux pays de la région de favoriser le développement du secteur privé, afin d’assurer la relance de la croissance, de favoriser la création de l’emploi, surtout au profit des jeunes diplômés. Toutefois, l’Afrique du Nord se présente comme la région la plus résiliente du continent africain face à la poussée inflationniste et aux changements climatiques. Une inflation engendrée, essentiellement par le dérangement de chaînes d’approvisionnement, durant la période de propagation de la pandémie puis par la guerre russo-ukrainienne qui a entraîné notamment l’envolée des prix des denrées alimentaires de base. Par ailleurs, les économistes proposent de mobiliser la dette pour financer les investissements productifs, ce qui permettra d’impulser une croissance économique soutenable à long terme.